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Auteur : Le Guen (Jean-Marie)

Référence : A-00433
Nom : LE GUEN
Prénom : Jean-Marie
Variantes de nom : Ar Guen (Yann-Vari)

Liste des chants recensés pour cet auteur : (47 chants)

Notice du catalogue Ollivier

Le Guen (Jean-Marie), fils de Pierre Le Guen et de Marie Henry, est né à Plougrescant le 24 décembre 1774. Il avait trois ans environ quand ses parents quittèrent cette commune pour s’établir à Plouguiel : « Il y a 710 mois que Yan ar Guen habite à Plouguiel », écrit-il dans le dernier couplet d’une chanson composée en 1836 (V. n° 959).
Les parents de Yan étaient de modestes journaliers et leur gain certes était bien modique. L’enfant — aveugle depuis l’âge de sept mois — fut-il, pendant quelques années du moins, réduit à la mendicité, comme nous le disent deux de ses biographes (1) ? C’est possible, mais je préfère croire que, bienfaisants comme le sont les Bretons en général envers les déshérités de la vie, les gens de Plouguiel qui employaient les parents de Yan autorisaient le père ou la mère à se faire accompagner de leur petit aveugle, et cela avec d’autant plus d’empressement que l’enfant, vu son infirmité, ne devait guère être turbulent, et qu’il manifestait peut-être déjà cette gaieté de caractère, cette vivacité d’esprit que l’on signalera plus tard chez lui. Ces qualités n’étaient pas pour déplaire à ces ménagères bienfaisantes, si l’on ajoute que l’enfant, à mesure qu’il grandissait, cherchait à leur rendre de menus services dans la mesure où le lui permettait son infirmité.
A l’âge de douze ans, en compagnie de son père, il commence son apprentissage de journalier, et ce métier il l’exercera pendant les quinze années suivantes, sans avoir d’autre préoccupation, comme il nous l’apprend dans une gwerz qu’il a composée « voar e vue » (2) :
N’em oa nemet daouzec via pa oan eet gant va zad
Hac e hon bet pemzec bla gantan o labourat
Deus an eil ty d’eguileo c’honit va zain boet.
Ha nemerd gand va labour ne oan quen occupet.

Ces indications sont intéressantes, surtout si on les confronte avec le récit quelque peu dramatique qu’Olivier Souvestre prête à Yan ar Guen, p. 88-89 du roman Mikaél, kloarek breton (paru en 1862). Mikaël rencontre, vers 1858, l’aveugle au pardon de Rumengol et lui demande à quelle occasion et dans quelles conditions il devint poète ambulant. Et Yan répond que c’est en 1792, à Quimper, par une belle matinée de juillet. Une foule bruyante se trouvait sur la place Saint-Corentin. Yan demande à l’enfant qui le conduisait ce qui se passait, et lorsqu’il apprend qu’on enrôlait des volontaires parce que la frontière était menacée d’invasion, il se fait mener sur la rive gauche de l’Odet, non loin de Locmaria, et là, couché sur l’herbe, il compose dix couplets, qu’il revient chanter à la foule. Devant le succès qu’il obtient — pécuniaire surtout — Yan ar Guen décide de vivre désormais du produit de ses chansons.
Dans son article Sur la piste de Yann ar Gwenn, Ch. Le Goffic a discuté le récit d’O. Souvestre et conclu en disant que la vérité semble bien être... qu’Olivier Souvestre a inventé de toutes pièces le personnage de Fantik [nom donné à l’épouse qui l’accompagnait à Rumengol], comme il a imaginé sa rencontre avec le vieux barde ». (3).
Les renseignements qui suivent, tirés de la même gwerz... voar e vue, ne font que confirmer le jugement de Ch. Le Goffic. A 27 ans — c’est-à-dire en 1801 — Yan ar Guen prit la détermination d’aller battre les chemins :
War ben neuze e oan en oad a zeis bla voarnuguent
Hac e liquiis em speret monet da vale hent.

C’est sans doute comme chanteur ambulant, puisqu’il ajoute que c’est à ce même âge qu’il commença à composer des chansons (4) :
Seiz vloa voarnuguent a oan pa lion bet commancet
Da ober zonio neve, pa gueven ar sujet.

Si Yan connaissait les chemins de Plouguiel au point d’y cheminer seul, il en allait différemment, maintenant qu’il s’agit d’aller de bourg en bourg pour exercer le métier qu’il vient de choisir. Force lui est d’avoir un guide sûr, dévoué. Il eut la joie de trouver un compagnon à peu près de son âge, un homme de confiance :
Eur c’hamarad a choasis, un den a gonfianç
Grêt ur c’honje en zervich ar Roue deus a Franç.

En pad c’hoec’h vloa e omp bet o vals assambles
O tivertissa an dud en quer ha voar ar mes.

Au bout de six ans, la mort enleva à Yan son compagnon. Le voilà « un den abandonet » !
Mais le 23 juin 1806 (5), Yan ar Guen, exerçant la « profession de chanteur de chansons », épousait à Plouguiel Marguerite Petibon, filandière, née à Plouguiel, le 1er juillet 1779, fille de feu Anthoine Petibon et de Louise Le Du mendiante
Yan ar Guen, dans sa gwerz, s’exprime ainsi sur son mariage :
Pa voan ur bloa ha tregont e hon bet dimezet
D’eur feumelen agreabl hac e deus ma soignet.
Bevet hon deus assembles en union Doue
Hac e reomp, mar gellomp, bete fin hon bue.

Désormais Marharit Petibon — qui survivra à son mari — accompagnera Yan dans ses tournées. Les différents témoignages que Ch. Le Goffic, probablement vers 1909-1910, a recueillis sur elle, « à Plouguiel et ailleurs, la représentent comme une accorte commère qui n’avait pas froid aux yeux, comme on dit, dont l’humeur n’était pas toujours des plus commodes ». Quand Yan chantait, Marharit lui donnait la réplique dans les parties dialoguées.
De leur mariage naquirent sept enfants, « un tyad bugale », dont trois seulement vivaient à l’époque où Yan composa la gwerz... voar e vue (7).
Un poète anonyme, qui a écrit une chanson sur Yan ar Guen (n° 52), cinq ans après sa mort, vers 1854, nous dit que Yan composait ses chansons dans l’âtre de la cheminée où était placé son « studi » : « En face de lui était sa femme qui cochait une baguette de saule. Chaque couplet comportait une coche et personne, avec ses deux yeux, personne, sinon l’aveugle, ne pouvait voir ce qui était composé » (8). Sa chanson terminée, Yan la dictait à quelqu’un de son voisinage sachant écrire, et c’est muni de ces manuscrits qu’il allait faire imprimer ses chansons (9).
C’est vers Morlaix qu’il se dirigeait. Là étaient établis ses imprimeurs habituels qui étaient tantôt, et le plus souvent, les Guilmer, tantôt A. Lédan père. Yan allait d’autant plus volontiers à Morlaix qu’il y retrouvait sa nièce Marie-Louise Lemoigne (10), mariée à un modeste journalier employé au port de commerce, Jean Nicolas, originaire de Perros.
Avec ses chansons fraîchement imprimées, serrées dans un sac de cuir qu’il portait sur le dos à la façon d’un soldat, Yan prenait le chemin du retour. Il s’arrêtait en cours de route pour chanter les jours de marchés et de foires dans les bourgs du Tréguier où il était assuré du succès. « Quand Yan ar Guen, nous dit le poète anonyme, s’arrêtait au coin de la place, il disparaissait vite au milieu de la foule la plus grande. Au premier mot de la chanson, on riait de tout cœur, et si la matière (de la gwerz) était triste, on pleurait à la fin du chapitre... »
Comment vivait-il pendant ses tournées? Il eût été intéressant pour nous de le connaître. Malheureusement ses contemporains ou ses biographes ont omis ces renseignements. Descendait-il dans les très modestes auberges où on logeait « à pied et à cheval », et y faisait-il bombance, en compagnie de Marharit, les jours où les recettes avaient été plus fructueuses que de coutume ? Ou bien demandait-il l’hospitalité clans quelque ferme où il était certain de trouver un lit improvisé dans un coin de l’écurie que l’on garnissait de paille fraîche ou dans le grenier rempli de foin ?
Sa tournée terminée et son stock de chansons nouvelles épuisé, Yan rentrait chez lui, à Crec’h-Suliet, dans la modeste chaumière qu’il avait construite ou fait construire sur les bords du bras de mer qui s’étend devant. Il y revenait pour passer la mauvaise saison, peu propice à ses tournées de chanteur, mais la bourse suffisamment garnie pour attendre qu’il pût se remettre en route. Et il composait de nouvelles chansons.
Parmi les chansons que nous avons de lui, le plus grand nombre se rapporte à l’actualité : crimes (11), naufrages, accidents, inondations, événements plus ou moins sensationnels, etc... S’il nous dit qu’il était « douguet voar an neventizo » (dernier c. du n° 660), il n’y a pas lieu de s’en étonner. A son époque, — comme avant et même longtemps après lui, — la chanson imprimée a tenu lieu de journal pour les acheteurs : pour la modique somme de deux sous, prix habituel des feuilles volantes, l’acheteur avait connaissance des faits divers les plus saillants, et cela lui suffisait.
Quand l’actualité ne lui fournissait aucun sujet, il lui fallait trouver quelque thème à développer qui plût à son public. C’est ainsi probablement qu’il a composé ces « Disput », dont j’ai relevé environ une demi-douzaine. Ce genre de chansons qui rappelle les jeux-partis du moyen âge, comme le fait remarquer Ch. Le Goffic, avait la faveur du public, avant Yan, et il la gardera même après lui. Des bardes lettrés de nos jours ne l’ont pas dédaigné, et le succès a couronné leurs essais.
Yan ar Guen a composé aussi des cantiques : il nous l’apprend dans le dernier couplet du n° 659 (voir le texte au n° 1000). Ces cantiques, il va sans dire, étaient destinés à être chantés non dans les églises, mais sur les places publiques par Yan et ses auditeurs. Ils valent bien les cantiques formés de lieux communs que l’on chante dans les offices et dont le mérite réside surtout dans la bonne intention de leurs auteurs et leur versification correcte. L’influence qu’exerçaient ces cantiques de Yan sur le public dut être assez grande. Le poète anonyme y fait sans doute allusion, dans la strophe suivante : « A peine levé, Yan rimait sur le jubilé, et quand il avait chanté sa sône (e son), tous étaient prêts à faire retraite »; et plus loin encore « Il n’y a aucun prédicateur qui fût autant écouté. Oui, Breiz-Izel, tu aimais suivre les leçons de cet aveugle ». Je n’ai signalé qu’un cantique de lui, sous le n° 1005. J’aurais pu — ou dû — également citer le suivant : Cantic spir. var ar Mission bet en Pleuyel (Plouguiel) er bla 1839. Et peut-être doit-on lui attribuer cet autre, non signé, imprimé chez V. Guilmer : Cantic en henor an Itron-Vari-a-Guir-Sikour, deus a Guer a Guengamp.
Une autre catégorie de ses chansons mérite également d’être signalée. Ce sont les pièces qu’il faisait sur commande : conscrits désespérés de se séparer de leurs douces et d’aller au service militaire; amoureux désolés que leurs parents contrarient leurs sentiments; chansons pour mariages, etc... Yan, sollicité, s’exécutait avec bonne grâce, et avec les remerciements des intéressés fiers d’être l’objet d’une chanson, il recevait encore quelques écus d’argent, ce qui pour lui n’était pas à dédaigner. Grâce aux indications qu’a données Ch. Le Goffic (L’Ame bretonne, IV, p. 121) d’après la vieille femme d’Yzen-Laouen, Françoise Le Quer, j’ai pu identifier la pièce de ce genre qu’il fit sur l’un de ses gendres, Jacques Raison : c’est le n° 823.
La popularité de Yan ar Guen, ainsi que je l’ai dit, a été grande pendant sa vie. Après sa mort, survenue à Plouguiel le 29 décembre 1849, son souvenir est resté vivace dans le peuple, surtout dans le Tréguier. Ses chansons également ne sont pas toutes oubliées, mais les personnes qui les chantent ignorent le plus souvent qu’elles sont de lui. Rien d’étonnant à cela : la disparition du couplet final dans lequel Yan les signait (quand il les signait) en est une des raisons, mais il en est une autre, c’est que le peuple, à l’encontre des chercheurs, s’embarrasse peu de savoir qui a composé ce qu’il chante. Dans ces conditions il est bien difficile, on le conçoit, de connaître le nombre de celles qui ont survécu dans la mémoire populaire, parce que nous ignorons et les titres de toutes les chansons qu’il a composées et signées, et les titres de celles qu’il n’a pas signées. Pour celles que nous savons être de lui, nous avons un témoignage de cette survivance par les collecteurs de chansons : leurs manuscrits ou leurs publications en font foi. Il y en a quelques-unes dans la coll. Penguern; Luzel, dans les Soniou (II, 252) a donné quelques strophes, recueillies par lui, du n° 346; M. E. Ernault, sous le titre La Nourrice et les Voleurs (Mélusine, III, col. 184-186) a publié une version du n° 947 A, recueillie à Trévérec (C.-du-N.), qui provient sans aucun doute du texte publié par Le Goffic, à Lannion et reproduisant celui de chez Guilmer en 1839, sauf le dernier couplet.
A consulter : Prosper Saint-Germain, Maison d’un poëte breton (Magasin pittoresque, juin 1842, p. 43-44); — A. Brizeux, Les Bretons, chant XXII (12); Les Ternaires (ou la Fleur d’or), livre III : Lettre à un chanteur de Tréguier (13); — Notice sur Yann ar Guen (Bibi. Nat., Coll. Penguern, fonds celtique, t. 93, fos 95-96); — X., Ar C’haner Yan ar Guen (v. n° 52 du présent catalogue); — O. Souvestre, Mikael, kloarek breton, p. 87-90 (Paris, Poulet-Malassis, 1862; in-12, 225 p.); — Luzel et A. Le Braz, Soniou Breiz-Izel, t. I, p. XXV-XXVI de la Préface d’A. Le Braz; — A. Le Braz, Au Pays des Pardons, p. 129-132 (Paris, C. Lévy, 1900); — E. Berthou, A la mémoire du barde Yan ar Gwenn (L’Hermine, 20 décembre 1894, p. 130-134), première rédaction qui sera développée dans : E. Berthou, Le Trégor à travers champs. — Les Bardes errants : Yann ar Gwenn (Le Clocher breton, octobre et novembre 1910). Le texte breton de cette dernière étude a paru dans Le Consortium breton, février 1928, p. 187-190; — Ch. Le Galle, L’Ame bretonne, 1re série, p. 7-11 (une édition illustrée, parue quelques années plus tard contient un portrait de Yan ar Guen); — 4e série, p. 102-128 : Sur la piste de Yann ar Gwenn. (Je crois que cet article avait paru précédemment dans Le Breton de Paris, 19 novembre 1911); — Jos Kervigou (Louis Le Guennec), Les Chansons de Yann ar Gwenn (feuilleton du Petit Breton, supplément hebdomadaire de l’Ouest-Eclair pour le Finistère, 5 octobre 1924; article reproduit dans : Louis Le Guennec, Vieux Souvenirs Bas-Bretons, p. 189-193; Quimper, Édition de la Société « Les Amis de Louis Le Guennec », 1938; in-80, 276 p.).
V. (signées par lui) n°s 289, 345, 346, 348-351, 354¬359, 361, 507-508 (c’est la même chanson), 562, 563, 565, 566 A-B, 573, 659-661, 823, 825 A-C, 939, 940, 946 A-B, 947 A-B, 948, 951, 952 A-B, 955-957, 959, 961 A-B, 962, 970 A-D, 974, 1000, 1005. — (non signées, mais que je lui attribuerais volontiers) n°s 344, 353, 360, 478 A-D, 492 A-F, 662, 664, 709, 960, 965, 1003.

(1) Voici les passages de ces deux biographes auxquels je fais allusion :
« Aveugle peu de mois après sa naissance, dans la misère la plus profonde, ses premières années se passèrent dans la mendicité. Il exerçait cette triste profession les jours de foire et de marchés, les dimanches dans les bourgs. D’un esprit triste et rêveur, il y écoutait avec avidité les complaintes, les dialogues rimés, dont le chant était alors si fréquent. De là, et à l’âge d’environ 20 ans, il conçut l’idée de composer lui-même, et d’aller dans tous les lieux d’alentour chanter lui-même aussi les malheurs, les catastrophes, quelquefois les satyres (sic) qu’il avait versifiés. » (Coll. Penguern, t. 93, f. 95 Notice sur Yan ar Guen. Cette notice a été composée par un correspondant anonyme de Penguern).
« Il (Yan) perdit ses parents dès l’âge le plus tendre et fut recueilli par des pauvres de son voisinage... » Tous les chemins (à Plouguiel) sont bordés de ces talus appelés kleuiou improprement. Dans l’épaisseur d’un kleu, l’on creusa un trou, et c’est dans cet abri que l’enfant aveugle passait sa journée en implorant la charité des passants. Les autres enfants lui tenaient compagnie, et lui, curieux déjà, leur demandait des renseignements sur les êtres et les choses. Quand quelqu’un venait à passer sur la route, le petit Yan se faisait raconter par ses amis tout ce qu’ils savaient. Malgré sa terrible infirmité, le jeune aveugle connut de bonne heure tous les habitants de la contrée. » (E. Berthou, Le Clocher breton, octobre 1910, p. 2000).

(2) Gwers neve groet gant Yan ar Goen o sonjal voar e vue. Voar don : Santes Anna ar Palud; 20 c. de 4 v. de 13 p. — Je ne connais cette gwerz que par un ms. appartenant à M. le D, C. Laurent, médecin de la marine, de Brest. Ce ms., acheté chez un bouquiniste, en même temps que quelques autres, semble provenir des papiers d’H. Violeau. Ce ms., d’écriture inconnue, mais du début du XIXe siècle, a été écrit sous la dictée : les c. 5-6, 12-13, 19-20 ne sont pas transcrits à leur place; ils se trouvent sur un 3e feuillet, avec des renvois.

(3) II est bien difficile d’admettre et le récit prêté à Yan ar Guen, et la rencontre de Yan avec O. Souvestre, c’est-à-dire de son héros Mikael, en 1858, puisque Yan ar Guen est mort en 1849.

(4) Tout en acceptant ce que dit Yan ar Guen, il y a tout lieu de supposer qu’avant cette date il s’est essayé à composer sur des faits locaux des rimadellou qu’il chantait aux veillées d’alentour, et que devant le succès obtenu il ait pris la détermination d’aller chanter de ci de là.

(5) Et non pas le 23 juin 1810, comme le dit Le Goffic. L’auteur de l’Aine Bretonne reproduisant l’acte de mariage dont il avait pris copie, j’avais accepté cette date quand ce travail paraissait dans les Annales de Bretagne (n°s 1 et 2, 1941), et j’avais été amené à me demander comment Yan ar Guen avait pu continuer sa profession ambulante. Mais il est évident que Le Goffic lu Dix là où on avait écrit Six. L’erreur est incontestable quand on remarque l’âge des mariés et leur date de naissance figurant dans l’acte. Ce rapprochement établit la date du mariage Yan, né en 1774, est âgé de 32 ans et son épouse, née en 1779, est âgée de 26 ans.
D’autre part dans sa gwers, Yan ar Guen dit aussi s’être marié à 31 ans.
L’erreur me semblait donc évidente quand M. Louis Le Dall, receveur des douanes à Landerneau, me communiqua la copie de cet acte de mariage qu’il s’était fait délivrer en 1937. Collaborant au Journal de Tréguier, M. Le Dall voulait y, écrire une biographie de Yan ar Guen en la faisant suivre d’une étude sur la douzaine de chansons qu’il avait réussi à se procurer. On ne peut que regretter que M. Le Dall (le barde Bouzie Ar Menhir), dont on a justement apprécié les Contes Nocturnes, n’ait pas pu réaliser son projet. Reposant sur des renseignements inédits, glanés dans le pays même, cette étude aurait été une vivante et poétique évocation du barde aveugle.

(6) « II (Yan) perdit ses parents dès l’âge le plus tendre... » Cette indication d’E. Berthou est certainement inexacte, puisque dans l’acte de mariage de Yan, que reproduit Ch. Le Goffic (L’Ame bretonne, IV, p. 105), les noms de son père et de sa mère ne sont pas accompagnés du mot feu ou feue, comme l’est celui du père de Marguerite Petibon.

(7) Cette gwerz a été composée très vraisemblablement vers 1836-1837, à l’époque où « dans un journal de Saint-Brieuc on fit un éloge de ses compositions et on appelait sur lui, sur son infirmité, et sa mission, un secours du département » (Coll. Penguern, t. 93, fo 95 r° : Notice sur Yann ar Guen. D’après certains indices, cette Notice me paraît avoir été écrite vers 1852-1853).

(8) « E gopi var un ibil a ra gant e gontel », dit Yan ar Guen lui-même (vers 4 du c. 21 du n° 955 : voir texte au n° 936 B). — Le correspondant de Penguern donne les indications suivantes : « Là au bruit des vagues et des cris plaintifs des oiseaux de mer, assis dans les beaux temps au pied d’un fossé, près d’un feu d’herbe, en son foyer quand il faisait mauvais, il composait, branlant sans cesse sa tête en avant par un mouvement égal et précipité. Armé d’une cheville et d’un couteau, il faisait par l’un une entaille sur l’autre à la fin de chaque couplet. L’œuvre accomplie, il allait la réciter et la faire écrire chez un voisin capable. » (Coll. Penguern, t. 93, D 95 v°).

(9) Sur les « secrétaires » de Yan ar Guen, voir Ch. Le Goffic, L’Ame bretonne, IV, p. 111-116. V. aussi note du n° 349.

(10) Originaire de Plouguiel, Marie-Louise Lemoigne, avant son mariage, avait accompagné son oncles « lorsque celui-ci venait à Morlaix faire imprimer ses complaintes chez Lédan », écrit Marie-Paule Sillonne, dans un article consacré à Jean Nicolas son bisaïeul maternel, Bretagne, mars-avril 1931, p. 73).

(11) Par deux fois, Yan ar Guen et Lédan ont traité le même sujet : le n° 666 (Lédan) correspond au n° 948 (Yan ar Guen); — le n° 710 (Lédan) correspond au n° 96 1A (Yan ar Guen).

(12) Les détails dont s’est servi Brizeux pour peindre le barde ont été puisés par lui dans l’article du Magasin pittoresque.

(13) V. note du n° 492 A.
[Ollivier, La chanson populaire bretonne sur Feuilles Volantes, p. 302-311.]

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